Église catholique en Brabant wallon

Archidiocèse de Malines-Bruxelles (Belgique)

Église catholique en Brabant wallon

 

Villers-la-Ville – Fête de la St Bernard 2015

Homélie de Mgr Hudsyn

23 août 2015 – 21ème dimanche B

Sœurs et Frères,

Nous avons entendu dans la 1ère lecture, qu’au moment d’entrer dans la Terre Promise, le successeur de Moïse, Josué, réunit tout le peuple. Ils vont célébrer ce qu’on pourrait appeler une ‘Profession de foi’. « Choisissez aujourd’hui qui vous voulez servir : le Seigneur ou les faux dieux qui sont aujourd’hui sur le marché, auxquels on est plus soumis qu’on ne le croit mais qui n’apportent pas la vraie vie ? ».
Ici, c’est St Bernard qui nous rassemble dans cette abbaye qu’il a voulu et qu’il est venu visiter en janvier 1147. Je suis toujours touché de savoir que ce grand saint, a foulé cette vallée. St Bernard a toujours été bouleversé par tout ce que le Christ nous a révélé de l’amour de Dieu. Aussi, il a fait de la quête de Dieu, l’affaire de sa vie. C’est ce grand amour de Dieu pour nous qu’il a creusé, prié, annoncé, pour que le plus grand nombre découvre ce trésor qu’il résumait en une seule phrase : « Comme tu m’as aimé, mon Dieu, mon Amour, comme tu m’as aimé !  » (Cant. 17,7).
Cet après-midi, rassemblé à l’occasion de sa fête, St Bernard nous pose la même question que Josué. Il disait : « Le Seigneur nous a aimés le premier ; oui, il nous a tant aimés, et sans mérite de notre part. Voilà pourquoi la mesure de notre amour pour Dieu, c’est de l’aimer sans mesure  » : et toi, est-ce ainsi que tu veux l’aimer et le servir ? Il savait que cela ne se fait pas d’un coup, qu’aimer Dieu cela se fait progressivement, par étapes, par degrés (comme il disait). Comme le peuple d’Israël à la croisée des routes, nous, chrétiens d’aujourd’hui vivant dans un monde peu porté à croire en Dieu, voulons nous poursuivre notre recherche de lui, à la suite du Christ ?
Et l’Evangile vient de nous mettre face à une question du Christ lui-même. Il voit bien que s’il pouvait attirer les foules pour toutes sortes de raisons, arrive le moment où le Dieu qu’il annonce, le chemin qu’il propose, sa vision à lui de l’amour, fait qu’un christianisme simplement hérité du passé, une appartenance vague, ne suffisent pas pour le suivre vraiment. C’est là que nous en sommes aujourd’hui, dans une culture et une société qui ne sont pas nécessairement pire que d’autres et qui sont mêmes purifiantes : car cela nous oblige à nous interroger vraiment sur nos choix : et nous ? voulons-nous vraiment continuer à servir le Seigneur ? Il nous pose à chacun cette question : « Et toi ? nous dit Jésus, même si certaines de mes paroles, si certaines de mes attitudes, si ma vision de l’amour suscitent en toi de la résistance (et c’est bien normal, en un sens), crois-tu que mon Evangile est vraiment esprit et vie ? – c’est-à-dire que mes paroles peuvent donner du souffle et de la vie à ton existence ? Ou bien, ou bien… « veux-tu partir, toi aussi ?  »…
J’attire votre attention sur la si belle et si fine réponse de Pierre. Il dit : « Seigneur, à qui irions-nous ?  » Sa réponse n’est pas : nous voulons rester avec toi. C’est plus subtil ! Il dit : mais alors, vers qui aller ? Autrement dit : nous, nous voulons continuer à aller vers toi, à être en chemin vers toi. Rester disciple, c’est toujours n’être qu’en chemin vers Dieu. C’est précieux de voir cela. Avec un minimum de lucidité, nous savons bien que nous ne sommes pas à la hauteur du Christ, nous marchons derrière lui, nous le suivons, comme nous le pouvons. Cette distance ne doit pas nous empêcher de répondre au Seigneur que nous voulons rester avec lui que nous voulons humblement n’être que des apprentis-disciples, avec des hauts et des bas, avec des avancées et des reculs… mais sans lui lâcher la main. Et en croyant surtout que lui ne nous lâche pas la main, qu’il reste à nos côtés malgré nos trainailleries et même nos doutes. Le choisir, c’est croire qu’il nous fait confiance, qu’il est bonté, patience, pardon inlassable. Même s’il brûle de nous voir devenir comme lui des hommes et des femmes plus croyants, plus aimants.
C’est ce que S. Paul aimerait voir vivre entre les conjoints. Bien sûr il part du fait que dans la société où il vit le mari est le chef de famille. Mais il apporte cette nouveauté : mettre de la réciprocité dans le couple. Il commence en disant justement « Soyez soumis les uns aux autres – soyez des serviteurs les uns des autres ». Et il ajoute même… ce qui n’était pas dans la vision de l’époque : maris, aimez votre épouse, aimez-la comme vous-mêmes, comme votre propre corps ; et plus encore : prenez soin d’elle à la manière dont le Christ aime l’Eglise !… Suivre le Christ, le choisir, c’est aussi consentir à prendre soin les uns des autres.
Et ce n’est pas tous les jours évident. Il y a des situations où cela nous fait hésiter : comme par exemple aujourd’hui, dans cette situation que viennent de rappeler les évêques de Belgique face aux demandeurs d’asile : quel pas faire pour ouvrir nos portes à l’autre ? comme le pape le répète aussi. Il suffit d’entendre les réflexions pour voir que nombreux sont ceux qui calent et murmurent. En même temps, des groupes divers et des paroisses de chez nous, ont voulu faire ce pas. Oui l’Evangile est exigeant… mais le Seigneur le sait : s’il se donne à nous dans l’eucharistie, c’est pour être avec nous, même quand nous lui résistons. Il vient pour nourrir en nous notre désir d’aller vers lui, même si c’est un pas à la fois.