
Homélie de Mgr Jean-Luc Hudsyn
Jésus n’a eu de cesse d’annoncer un Dieu de miséricorde. En parole et en acte.
Dans ses paraboles, il nous présente un Dieu qui ne cesse d’ouvrir les bras : le bon pasteur qui ouvre ses bras à la brebis perdue ; le bon samaritain qui ouvre ses bras au blessé abandonné au bord de la route ; le père du fils prodigue qui court vers lui pour le prendre dans ses bras…
Cela, Jésus l’a vécu aussi en acte et jusqu’au bout. Jusqu’à la croix. Ses bras grands ouverts sont le signe qu’il nous a donné jusqu’au bout de la miséricorde, de l’amour et du pardon de Dieu.
En ces jours troublés, nous avons vu de façon cruelle ce que serait un monde sans miséricorde et sans pitié. Sur la croix, face au mépris des pharisiens, face à des gens sans pardon, face à ceux qui vont le blesser à mort, Jésus garde les bras ouverts.
On l’a entendu : il protège ses disciples. Il fait remettre l’épée au fourreau. Il ne réplique pas aux outrages. Il met Pilate devant ses responsabilités mais sans l’humilier. Il prend soin de sa mère et de Jean. Il remet au Père son esprit…
Et l’évangéliste Jean comprend alors ce qui se passe : ce sang, cette eau qui sortent du côté transpercé de Jésus, lui font penser à ce que disait le prophète Ezéchiel dans sa vision du temple : sur le côté de ce temple, on pouvait voir jaillir une source d’eau vive : ses flots allaient grossissant, apportant la vie partout sur la terre.
Pour Jean c’est cela qui s’accomplit : du côté transpercé de Jésus, jaillit un amour débordant qui, face au mal et à la haine, va irriguer la terre entière et apporter la vie. Car finalement seul l’amour peut arrêter le mal et enrayer sa violence mortelle.
Déjà, dans ce récit de la passion, certains l’ont compris. Marie et Jean, qui sont restés fidèles à Jésus et qui comme nous ce soir ont voulu l’entourer. Joseph d’Arimathie et Nicodème qui sortent de l’ombre pour prendre soin du corps de Jésus. Et aussi d’autres visages pleins de compassion et d’amour dont nous parlent les autres récits de la Passion : Simon de Cyrène qui porte la croix de Jésus ; les femmes de Jérusalem tout en pleurs ; le bon larron qui se tourne vers Jésus ; le centurion touché au cœur. Tous ceux qui suivent Jésus sur son chemin de compassion et de bonté.
Ces jours-ci, ils ont été nombreux à ouvrir leurs bras malgré le chaos : voyageurs anonymes, personnel de l’aéroport et du métro, ambulanciers, médecins, infirmières, tous ceux qui ont consolé, soignés, soutenu : de leur cœur a jailli compassion, tendresse, amour gratuit. Et puis ces rassemblements où on voulait se dire qu’envers et contre tout, malgré la colère et la peur, on voulait vivre ensemble, sans céder à la haine, aux amalgames, à la vengeance.
Sur la croix, le Christ nous redit ce soir : seul l’amour – l’amour qui ne va pas sans la vérité bien sûr – mais seul l’amour, seule la miséricorde qui ne referme pas son cœur mais le garde ouvert, seuls l’amour et la miséricorde peuvent guérir les blessures du monde et les nôtres. – N’abandonnez pas l’amour, nous dit le Christ, ne m’abandonnez pas. Comme Marie, Marie-Madeleine et Saint Jean, restons donc au pied de la croix de Jésus et de son message ; en communiant à lui, nous pourrons rester avec lui, au pied de la croix de tous ceux qui ont besoin d’amour. Amen !
+ Jean-Luc Hudsyn